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Sud-ouest : ces électeurs que le FN séduit (making of)

Projet de départ :

L’idée de départ de ce projet était d’analyser le vote FN en fonction de critères socio-économiques : catégories socio-professionnelles, tranches d’âges de la population, revenus médians, niveaux de diplômes, taux de chômage, etc. Nous voulions tenter de déterminer si ces critères pouvaient démontrer une tendance structurelle, ou non, du vote FN.

Au début de ce projet, il nous est apparu évident que les Européennes de 2014 seraient intéressantes à analyser. Les différents sondages annonçaient déjà que le FN risquait fort d’arriver premier du scrutin. Cela nous permettait de nous situer dans une actualité chaude. La difficulté était que les résultats tomberaient en plein milieu des deux semaines de session data et laisseraient peu de temps pour le croisement des résultats du scrutin et des critères socio-économiques.

Toutes ces données ne présentaient pas de difficultés à être récoltées. Concernant les données socio-économiques, elles sont disponibles pour toutes les communes françaises sur le site de l’INSEE. Quant aux données électorales, elles sont bien évidemment publiques et compilées par le Ministère de l’Intérieur.

Pour analyser ces données, nous avions, au départ, pensé nous concentrer sur les 43 villes de plus de 10 000 habitants en Aquitaine. L’idée était de comparer les tendances structurelles du vote de 2014 avec celles des précédentes élections. Les Européennes de 2004 et de 2009, mais aussi les présidentielles de 2012 comme les scores du FN y ont été particulièrement élevés.

Les grandes villes, pas déterminantes :

Très vite, nous nous sommes rendu compte que l’analyse de ces 43 villes était problématique. Toutes les études sociologiques précédentes ont bien montré que le vote Front National avait lieu principalement hors des grandes villes, dans des lieux éloignés des grands pôles urbains qui, par définition, sont bien intégrés à la vie économique française.

Nous nous sommes dit qu’il fallait analyser un champ plus large et plus représentatif de communes. Comme nos données étaient facilement récoltables, nous avons opté pour l’analyse de toutes les communes de la circonscription du Sud-Ouest. Son découpage étant calqué sur trois régions administratives françaises, il serait facile de récolter les données.

La France en face et l’étude sociologique Fractures Françaises :

Pendant la session de data journalisme, nous avons regardé, sur les conseils de Suzanne Galy, le documentaire La France en Face réalisé par Jean-Robert Viallet et Hughes Nancy. Ce documentaire, que nous conseillons vivement, se fonde sur l’étude sociologique que Christophe Guilluy développe dans Fracture Française.

Le sociologue explique que toute une frange de la population française, les couches populaires, subissent une relégation spatiale importante. Les grandes villes qui ont un accès facile à l’emploi et aux bonnes écoles sont les gagnantes de la mondialisation. Les classes aisées ont investi les villes par un processus de gentrification. Parallèlement à ces classes urbaines, il existe une « France périphérique », éloignée des villes, de l’emploi et de l’accès à une éducation diversifiée.

Nous avons alors décidé de trouver des critères qui déterminent l’isolement ou l’intégration des communes au processus économique. L’INSEE a mis en place une catégorisation des communes françaises en fonction de leur intégration au tissu urbain et une autre en fonction de leur proximité aux bassins d’emplois. Ces deux critères nous ont permis d’illustrer cette fracture française.

La difficulté du taux de chômage :

Intégrer le taux de chômage à nos critères était évident pour analyser le vote frontiste. Cependant, les taux communes par communes n’existaient que jusqu’à 2010. Nous avons donc utilisé des taux de chômage en fonction des zones d’emplois.

Interview de Joël Gombin :

Analyser un électorat uniquement par des chiffres était trop limité. Il fallait parler des réalités humaines derrière ce vote en incluant le commentaire qualitatif d’un spécialiste. Cela nous a permis de prendre de la hauteur par rapport à nos chiffres.
Vous trouverez ici le site de Joël Gombin :

Dans l’ensemble, les difficultés de ce travail ont été de se structurer dans une masse de données considérables : quatre élections à croiser avec les données sociologiques correspondant à ces années là. Le tout concernant près de 7000 communes. Les possibilités de croisement de données étaient gigantesques mais il a bien fallu, au bout d’un moment, accepter de laisser de côté certaines pistes pour passer à la phase tout aussi cruciale d’analyse des résultats produits.

Damien Gozioso, Eléonore Sens et Romain Pouzin Roux.

Vous pouvez encore consulter les sites du datajournalismelab de 2013 et de 2012. Outre les productions des étudiants, vous y trouverez des documents visant à partager les expériences et la réflexion des nombreux acteurs de ce laboratoire autour d’un modus operandi de la formation au datajournalisme.